Ecrit par Laurent Maljan
Mon beau Merkel
Mon premier fusil fut un Merkel, à une époque où il y avait deux Allemagnes. Je me souviens que cela me faisait quelque chose de savoir que ce fusil avait été conçu dans la ville de Sühl, où étaient fabriqués les canons qui dévastèrent l’Europe.
C’était un juxtaposé car j’aimais cette disposition des canons qui montrait une certaine élégance, à la manière des fusils anglais de battue au faisan. Il me semblait également qu’il me serait plus facile de viser.
J’étais très jeune. Je venais d’avoir le fameux bac, et je travaillais chez un marchand de meubles de la région de Redon. Dès que je perçus mon salaire, je me rendis à l’armurerie. Je regardai les fusils, sans me soucier de la longueur des canons, de l’équilibre général de l’arme, sans me poser la question de savoir ce que j’allais tirer. Je voulais un juxtaposé, et le vendeur ne fit aucune difficulté à me vendre un juxtaposé. Il me mit l’arme dans les mains, me dit deux trois choses comme « c’est une très belle arme » ce qui était vrai, et je l’emportai, la plaçant au pied de mon lit, et allumant la lumière toutes les cinq minutes afin de mieux la regarder.
J’avais, jusque la, chassé dans mon petit pays, en communale, recherchant en priorité les gros faisans de lâcher, dont les belle plumes m’impressionnaient. Je ne dédaignais pas non plus les battues de renards où tous les chasseurs se retrouvaient. Les bécasses ne nous intéressaient pas, c’était un gibier d’appoint, ou de poche selon l’expression. D’ailleurs, il y avait très peu de chiens d’arrêt à Limerzel, en Bretagne.
Vous vous doutez que je rencontrai quelques difficultés avec le fusil. Ses canons étaient très choqués et très longs ce qui, pour un débutant, est une catastrophe. Cette année là, je fus bredouille, c’est ce que je raconte dans les contes du bois de Roz : www.journaldelaurentmaljan.fr.
La deuxième saison, je commençai à m’habituer à l’arme. Je fis surtout un progrès très important, involontaire au départ, qui fut de garder les yeux ouverts pour tirer. Je commençai également, à ce moment, à sentir l’équilibre général de l’arme et à mieux travailler mes angles de tir, surtout pour les rentrants. Je m’intéressai également à la bécasse qui abondait en novembre.
J’eus la chance de chasser à mes débuts avec les membres d’une famille de chasseurs qui avaient un setter. C’était incroyable d’observer ce chien se mettre en arrêt alors que nous ne connaissions que les cris et récris des beagles et griffons que nous menions. Le top pour nous était le chien qui menait en modulant ses aboiements selon le gibier qu’il poursuivait. Je me souviens d’un griffon appelé Miss qui aboyait toujours deux fois lorsqu’il rencontrait une bécasse.
Mais c’est la petite chienne d’arrêt, qui s’appelait Diane, docile et efficace, et qui faisait la fierté, à juste titre, de son maître, qui me marqua.
Je finis par me familiariser avec mon beau Merkel mais je commençai d’engager une réflexion. J’avais remarqué en particulier que les canons courts écartaient et que les fusils devaient être adaptés à la morphologie du chasseur.
A cette même époque, je me passionnai pour le gibier d’eau que nous chassions sur le domaine public maritime. Je me souviens des matins d’ouverture dans la rivière de Pénerf, où les chasseurs étaient très nombreux. C’est pourquoi j’envisageai d’acheter une nouvelle arme, un fusil automatique. C’est un fusil très meurtrier, surtout en calibre 12. C’était un Benelli qui me convenait parfaitement par ses dimensions et avec lequel je connus quelques succès, en particulier au marais.
Mais le fusil automatique a ses limites. D’abord, il est possible de tirer plusieurs cartouches ce qui semble déloyal à certains et ce qui peut expliquer qu’il soit interdit dans certaines sociétés de chasse. Il peut, par ailleurs, présenter un danger dans la mesure ou vous ne pouvez le casser, et que votre voisin de ligne ne peut savoir s’il est chargé.
Il eut ce mérite de me donner une grande confiance, et me conduisit, quelques années plus tard, à engager une nouvelle réflexion.
J’avais alors quitter ma petite communale pour des raisons professionnelles. J’avais commencé à m’intéresser à notre gibier roi qui est la bécasse. Et ce beau gibier méritait certes mieux qu’un automatique et le calibre 12.
Je décidai de passer au calibre 20, un peu par esthétisme, sans savoir que ce calibre convenait parfaitement au gibier auquel j’allais consacrer quelques années.
En effet, un calibre 20 est un fusil léger, et sa gerbe est plus concentrée. Vous tuerez mieux avec un 20, c’est indéniable. Il vous faudra ensuite adapter votre numéro de plomb au gibier que vous allez tirer.
Je passai également au superposé moi qui, étant plus jeune, ne jurait que par le juxtaposé. Cette disposition des canons vous fera gagner quelques centimètres. Vous tirerez un peu plus haut. Et j’adoptai définitivement la crosse révolver qui est beaucoup plus ergonomique.
Vous devrez ensuite prendre garde au choix de votre cartouche, c’est très important. Ne faites pas l’impasse sur la qualité d’une cartouche, et sur la vitesse des plombs.
Voici, cher lecteur, ma petite expérience en matière de fusils.
Ecrit par Laurent Maljan
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