Journal d'Irlande - Une larme et un sourire

Une larme et un sourire

Journal d’Irlande

Nov 14, 2021

Qu’ont en commun John Wayne, mythique acteur de westerns, et Jim Morisson ? Ils sont tous deux descendants d’émigrants irlandais.

On ne peut essayer de comprendre l’Irlande sans s’intéresser à ce puissant mouvement migratoire, lié pour beaucoup à la grande famine qui sévit de 1845 à 1852 et qui poussa un peuple à partir pour l’Australie où les États Unis. Les murets de pierres qui donnent à la région du Connemara un charme extraordinaire ne sont qu’une des conséquences de la famine. Ils furent en effet érigés en vue de la nécessaire redistribution des terres qui suivit cette triste page d’histoire.

La vague migratoire devait amener 1,5 millions d’irlandais à quitter leur pays, ce qui représentait un quart de la population. Comment un pays peut se remettre d’une telle baisse du nombre de ses habitants ?

« Le tout puissant a envoyé le mildiou mais les anglais ont créé la famine ! » C’est ce qu’écrivit en 1860 John Mitchel, l’un des fondateurs du mouvement « Joung Ireland ».

Il serait facile, s’agissant de la catholique Irlande, d’imaginer un châtiment divin, ou de fustiger l’attitude anglaise. Il est vrai qu’une des explications données est la loi d’héritage de 1703, instituée par Olivier Cromwell, qui pour punir les catholiques, leur interdit de transmettre leurs terres à l’aîné, ce qui devait entraîner une division extrême des héritages, obligeant les paysans, compte tenu de la surface à exploiter, à cultiver exclusivement la pomme de terre, qui, à partir de 1845 sera attaquée par le mildiou.

Et c’est vrai aussi que cette terre, dans le Mayo ou le Connemara, par son immensité et sa nudité, peut inspirer une certaine tristesse. Serait-ce le lourd fardeau du passé? Mais aussi offrir au regard une beauté première, comme « frémissante ».

Moi qui l’ai parcouru pendant une semaine, j’ai trouvé ces paysages très beaux.

Partir le matin de Rockhouse sur ce chemin qui domine la baie d’Achill Island fut un enchantement. Chaque matin la lumière était différente. Les eaux de la baie, en contre bas, tantôt semblaient un miroir et le lendemain, sous la pluie et le vent, s’animaient de noirs reflets.

Ce ne fut pas une chasse extraordinaire. Les bécasses étaient peu nombreuses et le terrain très difficile. Les bécassines, qui inspirèrent à Michel Deon de si jolies pages, furent également retorses. Pour un chasseur qui arrive à l’automne de son existence, c’est un gibier compliqué. Marcher pendant des heures dans ces pâtures à tourbe où il est prudent de regarder où vous posez le pied relève du challenge. Je l’ai relevé. J’ai sué, pesté contre le ciel lorsque pour la énième fois, je m’enfonçais jusqu’aux cuisses dans ce qui m’avait semblé être un tapis de mousse.

John, le guide, affirme qu’elles ne sont pas arrivées. Je l’espère. Et j’appréhende le retour en Bretagne.

Le soir, dans le salon, dans les profonds canapés de cuir, et en buvant le fameux  wiskhey, j’oubliai la fatigue accumulée. Je rêvais même à ces collines au-delà des tourbières où mon esprit s’était peut-être égaré. Et j’imaginais la pluie et le vent balayant l’immense plaine, et disparaissant après quelques minutes.

Les irlandais parlent d’un sourire et d’une larme pour décrire leur climat, tant il peut changer en quelques minutes.

Quelques beaux coups de fusil néanmoins sur des diablesses de bécassines, attendant le dernier moment, où poussées par les chiens, elles s’envolaient. Et sur les quelques bécasses entrevues dans l’enchevêtrement des branches. Une bécasse se mérite, c’est vrai en Bretagne, et c’est encore plus vrai en terre irlandaise.

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