
Ecrit par Laurent Maljan
Prends garde aux dames !
J’avais décidé de prendre du repos. C’est vrai, c’était le bon moment, entre une petite saison d’ouverture à Belle île et l’arrivée des bécasses.
Mais, il fallait préparer le relais de Poncalleck, et en particulier rentrer du bois, ce qui a été fait. Sauf qu’en repartant, j’ai vu la rivière, et la couleur des feuilles. J’ai vu la magie de cette lumière sur l’eau, et sur le point de rejoindre mes camarades, je n’ai pu m’empêcher de prendre quelques photos.



Une, deux puis trois, cherchant le meilleur angle, le plus beau cadre jusqu’à ce que je décide de m’aventurer un peu dans les bras de cette dame, parée de ses plus beaux atours, avec des tons ocres, roux, et de sortir Cheyenne que j’avais laissé dans la voiture. Vous la connaissez !
Elle est partie aussitôt, et je l’ai suivie ; on ne peut pas laisser son chien divaguer, c’est inscrit dans la loi. J’aurais pu la rappeler mais bon, il y avait le soleil à travers les feuilles, et le petit chemin était si joli. Vous savez le genre de petit chemin emprunté par les chevreuils, avec ces marques si délicates dans les feuilles mortes.
J’ai pensé à mes amis qui m’attendaient, et j’étais sur le point de rappeler Miss Cheyenne. Mais la gredine continuait, me regardant de temps à autre, avec ses yeux si doux. Et elle trottait comme une bienheureuse, les branches sur son passage la saluant, s’écartant, et je trottais moi-même, insouciant, rêveur, tout simplement heureux.
Vous le savez, il y a des matinées où, est ce le soleil, la promesse d’un rendez vous amoureux, la vie vous semble belle. Et vous êtes si absorbé par votre affaire que vous en oubliez le temps qui passe, et vos amis qui là-bas à l’auberge vous attendent et qui s’impatientent.
Quel gredin je fis ! Quelle mouche m’avait piqué ?

C’était dame nature, oui, la maîtresse, la danseuse de tous les chasseurs ; c’était en fait une sorte de rendez vous galant, un beau matin, en forêt de Poncalleck.
Croyez moi, on ne se refait pas, et mes camarades, qui revinrent sur leurs pas, pensant que l’un d’entre eux avait pu rencontrer un problème, et voyant celui-ci arriver au véhicule, sifflant, chantonnant même, poussèrent de hauts cris.
Mon ami ! Prends garde aux dames, surtout à celles qui sont parées des couleurs de l’automne.

Ecrit par Laurent Maljan
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