Ne le dis pas à ton chien Laurent

Ecrit par Laurent Maljan

15 septembre 2018

To kill or not to kill

Vous vous souvenez de ce brocard que vous avez suivi pendant des mois, celui que vous avez approché plusieurs fois sans pouvoir le tirer, et avec lequel vous vous êtes trouvé nez à nez, au détour d’un chemin. Un bel animal ! Avec ses yeux noirs et profonds, la perlure de ses merrains dans la lumière du petit matin, ce fut une rencontre inoubliable. 

To kill or not to kill
Le vieil homme et la mer
guillemet

Quand la détonation a retenti sur la forêt, et que vous vous êtes approché  de cette forme maronnée dans l’herbe verte, vous avez peut-être éprouvé un sentiment de confusion.

De même, une fois tirée la bécasse que vous avez poursuivi pendant des heures, que vous avez loupé, et que vous avez pu finalement cueillir, vous êtes vous posé la question du choix. Le problème est qu’un fusil ne pardonne pas.

A la pêche, c’est différent.

Comme chaque été, depuis quelques années maintenant, je pars en vacances sur une île, « à l’étranger ». Je veux parler de cette île merveilleuse, située à quarante cinq minutes de Quiberon, et qui porte bien son nom. J’y trouve le repos et cette quiétude qui permet de se retaper avant de retourner au travail. Ici, pas de grands immeubles masquant le paysage, pas de plage couverte de parasols mais de petites maisons avec leurs chevronnières, des petites criques encore sauvages. C’est un miracle permanent que cette beauté offerte aux hommes. Le vert des arbres, aperçu de la mer, comme une émeraude, et, au pied des promontoires rocheux, l’assaut des vagues, laissant à chaque passage, cette blanche écume, comme une dentelle à la robe d’une jolie femme.

Si vous succombez à ce péché, je veux parler d’une escapade à Belle Ile, vous pourrez vous adonner à la pêche, ce plaisir absolu, celui de la mer et de ses couleurs chamarrées.

Vous partirez au matin, après vous être renseigné sur la météo et les heures de marée, équipé d’un lancer. Pourquoi pas une Tenryu, la fameuse canne rouge, et de leurres aux noms ésotériques : mégabass, sawamura. ? Vous partirez de Sauzon, bien sûr, laissant derrière vous les petites façades roses, et vous longerez la côte, pour approcher de votre zone de pêche.

Alors, dans le bruit régulier des vagues, avec Poulains au loin, dans cette lumière si particulière, vous gouterez au bonheur, et peut-être, avec un peu de chance, à celui de prendre un poisson, et de vous poser la question que j’ai évoqué au début de mon propos, car c’est ce qui m’est arrivé.

En effet, c’était lundi dernier, j’ai pu éprouver le plaisir de prendre un beau poisson, un bar, ce seigneur des côtes. Quand j’ai senti la tension de ma tresse, que j’ai vu la courbe de ma canne, je me suis dit qu’il y avait du beau monde, là, dessous, à quelques mètres, luttant pour sa survie. Ce fut un réel plaisir, d’abord celui de ce combat, et ensuite de voir apparaître à la surface de l’eau, avec l’angoisse de le perdre, ce beau poisson aux écailles d’argent.

Je l’ai regardé dans le vivier, se heurtant à la vitre, m’observant de ses yeux éberlués. Et j’ai continué de pêcher, voulant peut-être fuir ce regard et l’oublier. Et, en fin d’après midi, sur le chemin du retour, quand les équipiers se rapprochent, et échangent leurs impressions, je me suis replacé devant la boîte à images, où, parmi le butin de la journée, j’ai reconnu mon adversaire. J’ai alors pensé à ce combat, à ces furieux coups de tête, et aussi, c’est con, à mon brocard, et aux bécasses qu’à chaque saison, je ne me pardonne pas de tuer. Et au large de Ster Vraz, cette crique de bout du monde, dans la lumière du jour, avec ce soleil au loin qui déclinait, je l’ai pris dans le vivier. Je l’ai un peu caressé, lui ai parlé, rien d’important, la couleur de l’eau, du ciel, et je l’ai balancé par dessus bord. Je me suis alors rassis, et je peux vous l’avouer, j’étais heureux.

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